Salut, je reviens justement d'une petite sortie. Sujet : oiseaux (canards en vol et bergeronette grise). Matos : 30D + 100-400.
Taux de réussite canard : 0%
Taux de réussite bergeronette : bonnes = 5%; excellentes = 0%
(par "bonne" j'entends que le non photographe s'exclamera : "waouh, elle est géniale ta photo").
Bien sûr, les conditions n'étaient pas idéales mais là n'est pas la question et de toute façon, elles le sont rarement.

A tous ceux qui se posent des questions au sujet du taux de réussite je réponds qu'au bout de 2 ans, de 20000 photos et d'un certain nombre d'heures consacré à la chose, j'attends toujours celle qui me fera vraiment planer et que mon taux de réussite est donc de 0%.

En mettant tous les paramètres les uns à la suite des autres, je me rends compte que ce genre de photo se mérite et en passant je tire mon chapeau à tous ceux qui nous donnent envie de persévérer.

Trouver le temps, trouver le sujet, trouver le lieu, trouver la lumière, trouver l'attitude : on en est déjà à 1% du temps total consacré à la photo et on n'a pas encore déclenché.
Maintenant il faut cadrer, penser à tous les réglages (et il y en a), maîtriser la lumière car la moindre erreur d'1/3 d'IL et c'est raté (pour peu qu'il y ait du blanc, du noir ou un plumage brillant....), maîtriser la vitesse et la PDC et tout ça en espérant être assez rapide pour que notre animal préféré ne soit pas déjà en Alaska.
On arrive déjà à 0,05%.
Et maintenant, il faut faire le point sur l'oeil d'une cible minuscule et constamment en mouvement, avec de préférence des branches devant, derrière et sur les côtés, en n'utilisant pas le collimateur central super précis machin chose mais le collimateur qui donnera un peu de champ dans la direction du regard mais qui est moins précis et moins rapide.
Enfin, on déclenche sans trembler avec 2 ou 3 kg tenus à bout de bras depuis 2 heures.

Epuisé, on rentre chez soit et on se rend compte qu'on est loin du compte. Bon, tant pis, ça sera pour la prochaine fois. Mais la prochaine fois c'est pas avant 15 jours parce qu'on a des obligations.... et dans 15 jours, zut, il pleut....

Il paraît qu'il existe des tas de techniques pour augmenter son taux de réussite : pister, traquer, repérer, fabriquer des affûts, passer ses soirées le nez dans des ouvrages spécialisés sur le specimen à photographier pour connaître ses habitudes, etc... Les livres spécialisés sont pleins de recettes... dont la moindre demande une grande énergie et beaucoup de temps.

Enfin, quand on y arrive, quand enfin on est fier de sa 20001ème photo on va sur l'eoscope "nature" et on se dit qu'on a encore du chemin à faire et "bon sang, comment font-ils ça ?" et "où trouvent-ils ces animaux, chez moi il n'y a que des moineaux...".

Bref, en ce qui me concerne, je crois qu'il faut beaucoup de travail, beaucoup de temps et beaucoup de chance (mais augmenter sa chance n'est-ce pas le but du travail et du temps consacré ?) et qu'avec tout ça on a encore des taux de réussite extrêment bas.

Au passage, souvenons-nous de ceux qui pratiquaient cet art en argentique et saluons-les pour leurs exploits.

Moi, je fais très peu d'affût ou alors de temps en temps je me planque vaguement sous une toile de camouflage. Je fais plutôt de l'approche. Alors avec du temps et de la patience j'approche des moineaux, des mésanges, des rouge-gorges et des bergeronnettes..... à 10 mètres. Avec énormément de temps et de patience, j'arrive à 5m. Et à 5m avec un 400mm ça reste tout petit un passereau et une fois recadré il me reste 2 Mpixels sur les 8 de départ, alors pour le net, ça va, mais pour le tirage A3, faut pas rêver. Parfois j'ai de la chance et ma route croise celle d'un ragondin ou d'un bouroundouk (animaux peu farouches). Mais le premier niveau de l'exotique (un simple pic-vert ou un martin-pêcheur, pourtant assez répandus dans ma région) reste encore une étape à atteindre.

Mais tout ça est-il vraiment important ?
Après 20000 photos ratées je ne regrette pas une de mes sorties, je ne regrette pas un seul des instants que j'ai passé parfois tout près d'animaux que je ne connaissait pas il y a 2 ans. Il y a de la magie dans cette "chasse" photographique et c'est déjà une immense récompense. Alors 1 photo sur 10 ou 1 sur 100000 ça ne fait pas tellement de différence, l'important est ailleurs, il est dans l'instant que l'on partage avec la nature.
Quand, après 4 heures d'affût, je n'ai pas vu un seul animal j'ai quand même passé un moment magique, au milieu des bruits et des bruissements, au milieu des ombres, et pendant 4 heures, l'assourdissant monde humain a disparu.