Préalable :

MAP = Mise Au Point. PDC = Profondeur De Champ. DH = Distance Hyperfocale

En paysage (mais pas exclusivement), on recherche souvent la profondeur de champ maximale (c'est à dire la zone qui apparait comme nette devant et derrière l'endroit où a été fait la mise au point). Intuitivement, on se doute qu'il faut fermer le diaphragme pour l'obtenir. Oui, mais fermer à combien ? F/8 ? F/16 ? Fermer pareil à 17mm ou à 50mm ? Comment obtenir la PDC la plus large possible ? Pour cela, il faut connaitre une donnée optique primordiale pour cet exercice : la distance hyperfocale.


Définition

La distance hyperfocale (souvent appelée par abus de langage et à tort "hyperfocale" tout court, mais il s'agit bien d'une distance !) est définie comme :

  • La distance nette minimale au delà de laquelle tout est net jusqu'à l'infini quand la MAP est à l'infini. En clair, on fait la MAP sur l'infini et on est net depuis la DH jusqu'à l'infini.


  • La distance sur laquelle la MAP doit être faite pour obtenir une PDC allant de la moitié de la DH jusqu'à l'infini. En clair, on fait la MAP sur la DH et on est net depuis la moitié de la DH jusqu'à l'infini



Avec quel objectif ?

A partir de là, la méthode à utiliser va dépendre des objectifs que vous possédez.

Si vous possédez des objectifs qui comportent des repères de mise au point avec une fenètre des distances, vous pourrez faire la MAP sur la DH ou sur l'infini.

Si vous possédez des objectifs qui ne comportent pas ces repères, vous ne pourrez faire la MAP que sur l'infini (en visant un objet lointain en One Shot). On peut en théorie faire la MAP sur un objet qui est à la distance hyperfocale par rapport au boitier. Mais ça impliquerait de mesurer précisément cette distance (gare au piège, voir ci-après).

En pratique, l'optimisation de la PDC ne peut donc se faire qu'avec des objectifs avec cette fenêtre des distances, pour faire coïncider le repère de MAP avec la DH que l'on aura calculée. Les autres, avec le même boitier, la même focale, la même ouverture, perdront à chaque fois, la moitié de la DH en profondeur de champ, à cause de leur impossibilité à régler précisément manuellement la MAP sur la DH. Cela dit, ils pourront quand même connaitre précisément les réglages qui leur permettront la PDC maximale avec leur matériel.


Calcul de la distance hyperfocale

J'utilise le logiciel freeware Barnack pour calculer la PDC du cliché, car les caractéristiques de chaque boitier me semblent plus complètes que sur dofmaster.com (pour lequel par exemple, tous les APS-C disposent du même réglage de cercle de confusion, sans tenir compte de la densité de pixels), mais le principe reste le même. Une traduction en francais est disponible ici (merci à BNCSC pour l'info). Je règle le cercle de confusion correspondant à la distance entre 2 pixels (je préfère cette valeur à un CoC classique de 0,019mm). Attention : La boite "35mm CoC Reference" doit contenir la valeur 0,030 puisqu'elle traduit la valeur du CoC au format 35mm autrement appelé 24x36... Ne changez jamais cette valeur (les données de calcul sont mise à jour avec la selection du boitier).

Ainsi, on règle, la focale, l'ouverture choisie, et on obtient la distance hyperfocale :



Pour 17mm sur un 7D, à F/11, la distance hyperfocale est à 3m. Plus on ferme, plus la DH est proche. Plus la focale est courte, plus la DH est proche. Elle n'est fonction que de la focale et de l'ouverture. Elle ne change pas avec la distance de mise au point.

Donc, si je peux, je fais une MAP manuelle en plaçant le repère en face de 3m et j'ai de facto une PDC qui va de 1,5m à l'infini. Si mon objectif est dépourvu de repère de distance, en faisant la MAP à l'infini, je sais que je serais net de 3m à l'infini.

On peut faire une table de DH, mais en pratique, je ne retiens que quelques distances seulement, en fonction de mes habitudes. Par exemple, je sais qu'à 10mm et F/11, la DH est à 1m, ce qui assure une PDC quasi totale quelque soit l'endroit où se trouve mon sujet.


Application de la méthode de la distance hyperfocale

  • Savoir quel valeur de diaphragme adopter afin d'éviter de "visser" inutilement (fermer) le diaphragme (à F/22 voire plus) et faire apparaitre la diffraction, qui dégrade la netteté du cliché.


  • Optimiser sa profondeur de champ et obtenir avec certaines combinaisons de focales et d'ouverture une PDC quasi totale, qu'on n'obtiendrait que par tatonnement sans connaitre les dessous de la technique et le calcul exacte de la DH.


  • Pouvoir s'affranchir de la mise au point, pour une réactivité maximale, en reportage par exemple. Ainsi, avec une focale reportage (22mm sur APS-C ou 35mm sur 24x36) à F/16 et en préréglant la MAP sur la moitié de la DH, on obtient une PDC très confortable en ayant fait la MAP une fois pour toute et les prises de vue se font sur le vif, sans devoir attendre que l'AF accroche quoi que ce soit. C'est aussi comme ça que sont pris les clichés grand-angle derrière les buts lors des matchs de football avec des boitiers télécommandés avec une MAP fixe sur la DH.



Le Piège

Le piège, c'est de régler sa MAP incorrectement sur la DH, c'est à dire en réalité sur une distance inférieure à la DH. Ex: la DH est à 3m et je règle la MAP avec mon repère de distance à "pas-tout-à-fait 3m". La MAP est en fait à 2m, on perd instantanément la PDC jusqu'à l'infini !!! On aura donc tendance à régler sa MAP un peu plus loin que la DH afin de conserver une marge de sécurité. Ce qu'on perd en optimisation, on le gagnera en sérénité !


Aide au calcul sur le terrain
(d'après l'article de Réponse Photo n°223)

On peut calculer sur le terrain assez facilement sa distance hyperfocale avec le nombre K (appelé NK). Par analogie avec le NG (nombre guide du flash), ce nombre divisé par le diaphragme donne la distance hyperfocale. Très bien, sauf que NK est dépendant de la focale... Pour les zooms, il faut donc un petit tableau où on a autant de NK que de focales... En pratique, on le calculera essentiellement sur les focales grand-angles de son zoom. Aucun problème avec les focales fixes évidemment.

Pour le calcul, c'est relativement simple (je passe rapidement sur la démonstration, tout part de la définition mathématique de la DH). Il s'agit de la focale au carrée divisée par le CoC (0,019 pour l'APS-C, 0,03 pour le 24x36 ou le "2-pixel CoC" de Barnack). Divisez ensuite par 1000 pour convertir les mm en mètre.

Par exemple, pour un 10mm sur APS-C, on obtient 10x10/0,019= 5263. Soit divisé par 1000, 5,26. Arrondissons par excès à 6 pour que ce soit pratique sur le terrain et que l'on soit sur de ne pas être en deça de la DH lors du réglage (voir le paragraphe "le piège").

On divise ensuite simplement ce NK par l'ouverture et on obtient la DH.

Ainsi, dans l'exemple, à F/2, l'hyperfocale sera à 3m. A F/5.6, juste au dessus du mètre (6/5.6=1,07m). A F/10, à 0,60m.

Sur mon image d'illustration, avec les réglages de la capture d'écran, on calcule un NK à 17x17/0.009 puis divisé par 1000, égal à environ 33. Et divisons 33 par 11, on obtient 3m, ce qui est du coup le résultat du calcul précis de la DH.

A noter que pour les allergiques au calcul, il suffit de demander à n'importe quel logiciel de calcul d'hyperfocale (Barnack et les autres) la DH à F/1. Il s'agit par définition du nombre NK.